mardi 27 septembre 2011

GRÈVE DES ENSEIGNANTS EN FRANCE


ÉDUCATION - La seule solution valable, pour les professeurs, est l'instauration d'un dialogue avec les politiques...

Le cortège est long et dense, mais les troupes marchent presque résignées. «Je ne me fais aucune illusion», lance Guillaume, professeur de mathématiques au lycée Louise-Michel (93). Comme beaucoup ce mardi, cet enseignant est venu accompagné de quelques collègues. Par petits groupes de trois ou quatre, ils discutent, avancent sur le boulevard Saint-Michel, situé à proximité de La Sorbonne, d’Assas et du lycée Henri IV: «On est nombreux, ça fait du bien au moral mais pour l’instant le rapport de forces n’est pas suffisant.»

«Nicolas Sarkozy n’a vraiment rien compris»

Certains ont même déjà entendu les déclarations de Nicolas Sarkozy lors de sa visite de ce mardi matin à l’usine de carburant vert de Venette (Compiègne). «Notre mouvement ne peut pas faire de mal mais quand j’ai écouté les informations à 13h, je me suis dit qu’il n’avait vraiment rien compris», se désole une jeune enseignante d’un lycée de ZEP à Sarcelles.
Un avis partagé par Patrick Gonthier, secrétaire général de l’Unsa (fédération des métiers de l’éducation): «Si le gouvernement pratiquait le dialogue social, les tensions seraient moins fortes mais là, sans discussion, il est difficile de croire que cette action puisse aboutir.»
Ce n’est pourtant pas faute d’avoir de nombreuses revendications. A commencer par les suppressions de postes. «C’est intolérable que les classes de primaires soient surchargées», tempête Philippe Hivernet, enseignant au lycée Blaise-Pascal (77). Pour ce professeur d’éducation physique et sportive qui exerce depuis presque 38 ans, la pilule passe mal: «Le système éducatif est en train d’être détruit et ce sont les élèves en difficulté qui sont les premiers à en pâtir.» Une opinion partagée par tous ses confrères. «Les classes de primaires avec 32 ou 33 élèves ne permettent pas de travailler dans de bonnes conditions. Il y a une déshumanisation de l’école», s’indigne Giselle Skriabil, institutrice remplaçante dans le département de la Seine-et-Marne.
«Le problème, c’est que l’enseignement n’est pas un service. On doit être rentable alors que l’apprentissage des enfants ça ne se comptabilise pas», déplore Annie Gérard, aujourd’hui retraitée mais qui a enseigné pendant 38 ans en maternelle et au CP.

 La seule solution: le dialogue

 S’ils n’y croient pas, alors pourquoi se sont-ils tous réunis? «On espère que ça va marquer le coup avant la présidentielle, que ça va devenir l’un des sujets principaux pour les élections», souhaite Annie Gérard, aujourd’hui grand-mère de deux petites filles. D’autres y voient le début d’un long bras de fer: «Il ne faut pas se limiter à une journée de mobilisation. Pour les retraites, on a bloqué des raffineries, ça a mis la pression», s’enflamme Hugo, un étudiant âgé de 26 ans. Et d’ajouter: «Moi je fais partie du mouvement des “indignés”, je crois qu’il ne faut pas attendre les initiatives des syndicats, tout le monde doit se mobiliser et dans chaque secteur.» Une opinion partagée par Alain Bonhomme, père d’une élève de première du lycée Racine (Paris VIIIe): «Protester c’est bien, mais lutter, c’est vachement mieux!»
Alors que se profile la présidentielle en mai prochain et un possible changement à la tête de l’Etat, l’espoir pourrait être de mise. Et pourtant, là encore, l’enthousiasme n’est pas non plus au rendez-vous. Pour Hugo: «Au PS, ils ont un vernis différent mais en gros ils ne changeront rien». «On a toujours de l’espoir, ils en parlent dans leurs discours, on verra bien», ajoute Annie Gérard, venue accompagner plusieurs jeunes enseignantes.
Pour les manifestants, l’école peut être sauvée par le dialogue entre politiques et enseignants. «Les réformes doivent être faites avec nous. Nous sommes tous les jours sur le terrain, nous savons ce qui marche et généralement, quand nous appliquons nos solutions, elles fonctionnent», affirme un professeur du lcyée Paul-Valéry (Paris XIIe), qui enseigne les mathématiques depuis 21 ans. Et de conclure: «Nous ne pouvons plus être ceux qui subissent les réformes.»
 Olivia Vignaud

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